Renan Luce
Quand je me plonge dans l'univers d'un artiste que j'aime, c'est toujours jusqu'à m'y noyer. Après plusieurs mois de Berry intensifs, me voilà revenue à Renan Luce. Un peu comme les enfants je suis monomaniaque. Quand j'aime quelqu'un je l'aime entièrement, et je l'écoute, je le lis, je le relis, je le murmure, je m'en imprègne jusqu'à atteindre les mouvements de ses pensées jusqu'à les mêler aux miens, jusqu'à atteindre ses inspirations, ses soupirs, ses hésitations.
A vrai dire, j'aime certain(e)s auteurs, certain(e)s interprètes comme on cherche un homme, comme on trimballe ses amis. L'impression de se trouver pile au bon endroit.
Je me sens portée par la musique (qui vient pour ma part souvent en deuxième plan, le premier contact étant celui des mots), je sens mon corps se mettre en mouvement, mes souvenirs s'éveiller, les mots s'inscrire dessus, goûteux, je les écoute mille fois avec le même plaisir, je suspend mon souffle en attente du ver, de l'association de mots, de la sonorité qui me renverse à chaque fois avec certitude. Ce presque rien, cet infiniment petit qui se glisse entre les mots, qui me lie à celui qui les prononce dans une vérité absolue qui colle absolument au corps, au coeur, au vécu, qui résonne, qui vibre, qui transcende, qui désarme.
Je m'habille de ces mots qui m'accompagnent. Ca m'aide à penser, ça m'aide à rêver, ça me fait palpiter. Ca m'aide à écrire aussi. Ca nourrit mon imaginaire et ça m'entraine au fond de moi. Je me surprends à y découvrir des nuances inconnues. Comment est-ce que je peux être toutes ces personnes à la fois? Comment peut-il y avoir une telle infinité en moi qui se crystalise pourtant en un unique endroit, un lieu exact. Là où ça fait du bien. Là où je me sens vivante.
Renan Luce fait partie de ces artistes que j'aime. Je suis sensible à ce qu'il dégage. Le grain de sa voix, les sonorités, les mots qui s'emmêlent, son regard, sa réserve, le monde qu'on imagine derrière la façade de quelques rimes, les images qui naissent comme des courts métrages, les émotions... Je l'ai vu une fois en concert, et il était tout aussi captivant.
En ce moment je suis plutôt sur son premier album, Repenti (que je préfère au deuxième). J'avais déjà posté une vidéo de la chanson "I was here"
"Ouvrez les yeux car où que j'aille Je laisse derrière moi des entailles, des rayures
Et les gravats qu'il me reste Servent à combler ma tristesse, mes fêlures..."
Je découvre surtout l'Iris et la rose que je n'arrivais pas à écouter avant et que je me passe en boucle à présent (j'ai une affection particulière pour ces chansons qui résistent et qu'on ne rencontre que bien plus tard, une fois le reste de l'album assimilé...)
"Une guêpe s'envole, se pose, butine
Et l'image cogne à ma rétine
Mais déjà mon regard est loin
Je ne sais plus voir le quotidien...
J'aimerais réveiller sans mémoire
Redécouvrir ce que je peux plus voir"
Il y a aussi 24H01 que j'aime tout particulièrement:
" Une minute pour se faire la belle
Avoir la lune sous mes semelles
Et les cheveux dans les étoiles
Une minute pour se faire la malle
Et ne plus être ce type normal
Coincé devant le p'tit écran
En rêve j'ai plus de cran
L'aiguille hors du cadran
A 24H01"
Pour ne pas citer les plus connues ("Les voisines", "la lettre", "repenti", "mes racines" -magnifique aussi!)
Et dans son deuxième album, le clan des miros, il y a aussi "Nantes", j'ai un faible pour "Les gens sont fous", la musique de "la rue de l'oiseau lyre", "on n'est pas à une bêtise près", "Aux timides anonymes"..) et là la chanson qui résiste et que je découvre avec ravissement c'est "Chez toi". Non, en fait il est bien aussi ce deuxième album :)
Commercial, pas commercial, à vrai dire, ça m'est égal. j'ai juste en face de moi quelqu'un qui fait écho en moi, qui éveille des images, des textures et des envies, qui m'amène à creuser et à rêver. Y a de l'humanité qui résonne et c'est la seule chose qui me pousse vers un artiste.
Une interview ici pour ceux que ça intéresse, car il est plaisant aussi à entendre parler